RAKU, D’hier à aujourd’hui

La céramique raku a surtout était utilisée au Japon pour la cérémonie du thé.

Cette céramique est née d’une rencontre entre un potier de talent Chojiro et un des plus grands maitres de la cérémonie du thé, Sen no rikyû.

Sen no rikyû issu d’un milieu de famille marchande a joué un rôle important dans l’évolution de cette céramique.

Au xv ème siècle les bols à thé étaient des pièces d’importation chinoise – souvent des objets en grés (cuisson haute température dans les fours en escalier, four anagama ) avec un émail « goutte d’huile » ou avec des variations de feu.

Ces objets pour la cérémonie du thé étaient surtout utilisés dans les milieux raffinés et c’est donc au cours du xvi ème siècle que Sen no rikyû a marqué l’évolution de ces bols basés sur le principe du wabi – qui est la quête de la beauté dans ce qui est simple et naturel.

La cérémonie du thé devient alors une discipline esthétique basée sur la loi bouddhique visant à atteindre le salut spirituel.

Pour Sen no rikyû, il y a la recherche d’une communion étroite avec la nature et ses aspects les plus humbles.

En approfondissant la doctrine du wabi , émise par le premier grand maître du thé,
Murata jukô (1423-1502), Sen no Rikyû donne à la cérémonie du thé une forme plus intime et sobre (matériaux naturels pour la construction des pavillons de thé – sol avec natte de paille, utilisation du bambou pour les cuillères, fouets à thé et bols raku )

Sen no rikyû avait une grande sensibilité pour l’harmonisation d’un lieu, des objets.

Il fut en son temps et pour les autres générations une référence.

Il aimait s’entourer des meilleurs artisans comme ce fut le cas avec le potier Chôjiro.

Les premiers bols réalisés par Chojiro sont mentionnés dans les journaux de thé vers 1586. La fabrication date d’environ 1578.
Les bols sont d’abord nommés comme « céramique moderne » en opposition à la céramique chinoise ancienne.

Les premiers bols sont surtout en terre rouge (appelée argile de juraku)
Ces bols présentent plusieurs innovations :
*Réalisés à la main et non au tour
*Reçoivent une marque individuelle sous les doigts et le couteau de bambou de l’artiste
*Cuits en basse température (700. 800 degrés)
*Dans un petit four (contrairement au grés dans un grand four)
*Application d’un émail (couverte) pour des pièces en basse température avec un émail rouge, émail noir, émail blanc.
*Évolution de la forme : pas de formes coniques et évasées mais une forme cylindrique avec des parois verticales au corps profond .Les parois verticales parfois s’arrondissent doucement dans la partie inférieure. Les lèvres légèrement rentrantes peuvent épouser un mouvement ondulant.

La création des premiers bols raku est donc due à Chôjiro et à l’œuvre de son atelier (avec 5 -6 personnes) pensent on.
Les spécialistes ont pu déterminer plusieurs mains les bols qui nous sont conservés.

Le terme raku ne fut utilisé au japon qu’une dizaine d’années après la création.
Un cachet d’or portant le caractère « raku » aurait été offert à chôjiro à titre honorifique.

Le nom raku fut alors utilisé par la famille détentrice de la technique.
Le cachet raku fut apposé sur les objets.
Le sens de raku – plaisir, joie, jouissance spirituelle.
La famille raku a perpétué une technique et un style pendant près de 400 ans. Chacun des potiers, héritiers du nom raku à, par sa personnalité, apporté des variations dans la forme et l’émail.

A la fin du xvii siècle, des fours spécialisés dans cette cuisson sont fondés par des membres de la branche directe ou par des disciples de la famille raku

Ce procédé, surtout utilisée à partir des années 1950, est arrivé en Occident au début des années 1900 avec Bernard Leach, potier initié par les japonais.
Actuellement, le procédé des rakus a gagné les pays étrangers mais a perdu le sens profond lié à la cérémonie du thé.

Par contre, elle a gardé le sens d’une présence à l’objet.

La poterie raku ne puise pas sa beauté dans des aboutissements techniques, mais plus dans une façon d’entourer l’objet et d’être relié à soi même, de rester en lien avec les éléments eau, terre, feu, air. C’est une technique où l’on peut prendre le sens de l’esprit, le sens du être à soi même avec l’objet créer qui se transforme par la cuisson.
Elle permet la personnalisation de chaque pièce (qui s’oppose à la reproduction exigée par les manufactures de l’époque).

C’est un processus de création qui aujourd’ hui permet, avec le façonnage et la cuisson, d’être directement en lien avec la matière et de manière privilégiée en accompagnant son objet, son bol, jusqu’ au bout de sa réalisation.

C est une façon de cultiver « ce qui se fait de soi même ».
Mai 2011 – Christine Cosmano – Prohaszka